"ils ne sont pas morts, parce qu’ils vivent dans la lutte"

"une valeur inestimable, un dévouement désintéressé et une constante probité intellectuelle"
Par Yves Cossic (Survie)

Prise de paroles de Yves Cossic, au nom de l’association Survie, le 13 juillet 2006 à Montégut sur Arros, deux jours après le décès de Jean-Paul Gouteux.

Dans la dure épreuve d’une disparition brutale pour les siens et pour ses amis, l’association Survie tient à exprimer toute sa reconnaissance envers le travail militant de Jean-Paul Gouteux, une longue activité centrée sur l’information et la clarification des problèmes lourds liés à la présence militaire de l’Etat français dans l’Afrique subsaharienne.

Toute cette activité s’est traduite en particulier par une collaboration étroite avec la publication mensuelle de Survie, Billets d’Afrique.

Jean-Paul Gouteux avait également contribué par sa participation au conseil d’administration de l’association au maintien d’une position claire et ferme de Survie face à l’interventionnisme militaire de l’Etat français dans les pays qui sont demeurés sous la tutelle néo-colonialiste comme le Tchad, la Côte du d’Ivoire, le Zaïre, Djibouti, le Congo Brazzaville, le Burkina Faso, le Niger, le Sénégal, le Togo, le Gabon, etc. …

La forme la plus criminelle et la plus monstrueuse de cet interventionnisme a consisté dans le renforcement de l’aide militaire au régime génocidaire du Rwanda entre l’opération Noroît et le déclenchement du génocide en avril 1994. Avec la même ténacité que François-Xavier Verschave, Président de Survie décédé en juillet 2005, Jean-Paul Gouteux a su dénoncer toutes ces manœuvres de l’Etat Français et des réseaux de la Françafrique.

Odile Biyidi, actuelle Présidente de Survie et Sharon Courtoux m’ont chargé de communiquer aux enfants de Jean-Paul, à son épouse Marie, à sa mère, à ses frères et sœurs, à sa belle sœur Bernadette et à son mari, à ses collègues de l’ Université de Pau, l’expression d’une franche sympathie dans ce moment d’épreuve.

Odile Biyidi a tenu à me rappeler au téléphone que l’effort militant de Jean-Paul Gouteux a été d’une valeur inestimable, car caractérisé par un dévouement désintéressé et une constante probité intellectuelle.

C’est certainement cette ligne de conduite qui a permis à Jean-Paul Gouteux de gagner plusieurs procès contre le journal Le Monde depuis la publication de son livre [ndlr : Un génocide secret d’Etat, confirmée ensuite par celle d’un deuxième livre] Le Monde, un contre pouvoir aux éditions L’Esprit Frappeur.

Le Journal Le Monde avait en effet adopté la stratégie du mensonge grossier à la manière de Goebels durant toute la période du génocide des Tutsi du Rwanda en 1994, afin de brouiller les cartes et de cacher le soutien de l’Etat Français aux forces du génocide sous la présidence de François Mitterrand.

Dénoncer ce type de mensonge et tous les lamentables alibis, qui voudraient excuser des politiques criminelles, a été le souci constant de Jean-Paul Gouteux.

Mais l’établissement de la vérité des faits historiques ne suffit pas dans le combat contre l’impunité des principaux dirigeants du génocide et de leurs alliés intérieurs ( l’église catholique principalement) et extérieurs (l’Etat français), les complices passifs ( l’O.N.U, le parlement européen, les U.S.A).

De façon préventive, c’est principalement la lutte claire et fraternelle pour une véritable justice sociale, qui peut contribuer à neutraliser l’instrumentalisation politique des passions haineuses, du type de celle qui s’est développée en crescendo sous l’influence de l’idéologie ethniste mise à l’œuvre dès 1957 par Grégoire Kayibanda comme par la hiérarchie catholique « sous la supervision de Mgr Perraudin et des Pères Blancs belges Ernotte et Dejemeppe » comme le rappelle très justement Jean-Paul Gouteux dans le dernier ouvrage publié un mois avant sa mort par les éditions Syllepse : Apologie du blasphème.

Le souvenir de tous ses efforts en vue de la vérité et de la justice va demeurer vivace dans l’esprit des militants de Survie comme chez tous ceux qui, d’Afrique et d’ailleurs, luttent en faveur d’une autodétermination des peuples.

Enfin, nous adressons à tous ceux qui veulent demeurer fidèles à l’engagement courageux de Jean-Paul Gouteux la parole que Raul Zibechi attribue à Los Hijos, l’association des fils des disparus qui protestait contre les crimes de la dictature militaire sur la Plaza de Mayo à Buenos Aires en Argentine : « Los Hijos affirment que leurs parents n’ont pas disparu, qu’ils ne sont pas morts, parce qu’ils vivent dans la lutte ».

Yves Cossic (au nom de l’association Survie)

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"une valeur inestimable, un dévouement désintéressé et une constante probité intellectuelle"
Titre : : "ils ne sont pas morts, parce qu’ils vivent dans la lutte"
Par Yves Cossic (Survie)
¬ Lien hypertexte (référence, site à visiter...) : La nuit rwandaise
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Date de publication en ligne : 13 juillet 2006
URL : https://gouteux.net/jean-paul/ils-ne-sont-pas-morts-parce-qu-ils.html
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Mots-clés | Tags : Hommages

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